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Créer l’identité visuelle de NERO : entretien avec Florine Bel, Color Scientist chez MPC

Découvrez comment Florine Bel a contribué à créer l’identité visuelle unique de la série Netflix NERO.

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October 13, 2025

Florine Bel, Color Scientist, revient sur sa collaboration avec les chefs opérateurs, le DIT et les équipes VFX de la nouvelle série Netflix Néro, pour définir et préserver un look fort et cohérent sur les huit épisodes. Une plongée dans les choix esthétiques, les LUTs et le workflow colorimétrique qui ont donné vie à l’univers de la série.

Comment avez-vous collaboré avec les chefs opérateurs et Magali Léonard pour définir l’identité visuelle de la série et créer un look cohérent sur les 8 épisodes ? 

La série Nero compte huit épisodes, sous la direction de deux chefs opérateurs : Romain Lacourbas pour les quatre premiers et Vincent Gallo pour les quatre derniers. Avant le tournage, j’ai travaillé avec Romain et Magali Léonard, l’étalonneuse des huit épisodes, afin de définir le look de la série. Romain et Vincent se sont ensuite concertés pour assurer une continuité visuelle entre leurs blocs respectifs, continuité renforcée par le travail de Magali qui a étalonné l’ensemble. J’ai rencontré Magali et Romain lors d’un premier visionnage des essais filmés, réalisés dans un décor d’époque proche de l’un des lieux clés de la série : un intérieur boisé, traversé de grandes fenêtres à carreaux et ponctué de vitraux. Ces premiers essais concernaient la lumière et les optiques ; d’autres essais costumes avec les comédiens étaient prévus plus tard. Romain nous a expliqué, à Magali et moi, ce qu’il imaginait pour l’image de la série : un contraste marqué, des couleurs contenues et denses, tout en respectant le travail des costumes et des décors. Nous pouvions parler de ces intentions en regardant les images des premiers essais et en testant des premiers réglages d’étalonnage, de saturation, de contraste… Magali a appliqué deux LUTs que Romain avait ramenées et qu’il appréciait pour certains aspects. Cette discussion m’a permis de comprendre l’univers esthétique souhaité, avec des exemples concrets de ce qu’il aimait et n’aimait pas. Parler de couleur devant des images permet de préciser le vocabulaire, de comprendre le contraste qu’il souhaite et de définir les limites des saturations pour ce projet. La série prévoyait un étalonnage principal en HDR, puis une déclinaison en SDR. Il était crucial de visualiser les essais lumières sur un moniteur HDR pour bien se rendre compte du détail dans les hautes lumières et faire des choix sur le rendu des hautes lumières filtrées et modifiées par le look. 

Après cette discussion, j’ai créé des propositions de looks sous forme de LUTs que j’ai données à Magali pour qu’elle les teste sur les essais costumes et maquillage. Nous avons revu ces looks avec Romain et choisi ce qui serait utilisé pour Nero : un look nuit, un look pour jour ensoleillé, un pour les jours nuageux et un look “nuit américaine”. J’ai retravaillé les looks choisis pour intégrer les retours de Romain et Magali sur le contraste et le rendu de certaines couleurs. 

J’ai donné les looks finalisés au DIT Brice Barbier, qui les appliquerait sur le plateau et me ferait des retours si d’autres ajustements des looks étaient nécessaires. Brice pré-étalonnait les rushes sur le tournage en fonction des indications de Romain ; il pouvait donc vérifier le fonctionnement du look en étalonnant. Il sortait ensuite les dailies pour le montage, avec pré-étalonnage et look appliqué. 

Quels outils, LUTs ou workflows colorimétriques avez-vous mis en place pour que le look défini sur le tournage soit respecté en post-production ? 

Les looks étaient déclinés en LUT pour la caméra Sony Venice 2 et ainsi les rushes en RAW avaient la métadonnée de la LUT caméra utilisée. Une fois le montage fini, pour préparer les projets d’étalonnage à MPC, on a récupéré le pré-étalonnage de Brice fait sur Daylight et le look utilisé, et on a préparé la conformation dans Baselight. L’utilisation de Daylight sur le plateau et de Baselight en étalonnage permet d’utiliser pleinement les outils Filmlight sans se limiter à des CDL ou LUTs en pré-étalonnage. Les artistes VFX à MPC récupéraient l’étalonnage du plan sous forme de LUT dans le workflow ACES 1.3, et pouvaient donc travailler avec le pré-étalonnage qui modifiait parfois fortement le rendu des couleurs. 

Comment avez-vous intégré les contraintes liées aux VFX dans la création du look, notamment pour les plans numériques ou complexes ? 

Les intentions esthétiques du look n’ont pas été définies en fonction des effets puisque les effets suivent ces mêmes intentions. En revanche, le look a été construit dans le workflow ACES pour conserver toute la dynamique du signal avant de sortir le HDR et le SDR. Les looks de Nero sont assez forts esthétiquement, froids, et ils compressent beaucoup les couleurs. Les artistes des VFX peuvent désactiver le look pour afficher la LUT ACES 1.3 et avoir un rendu des couleurs plus neutre pour ajuster les couleurs créées dans les ajouts VFX, puis réactiver le look pour vérifier que l’effet visuel tienne aussi avec ce traitement couleur. Ceci se fait facilement dans Nuke et l’ensemble des outils qu’ils utilisent grâce à la gestion des couleurs avec OCIO. 

Les artistes VFX travaillaient majoritairement en SDR et vérifiaient fréquemment les images sur les écrans HDR. Les LUTs SDR et HDR de l’ACES 1.3 donnent des rendus relativement cohérents à partir d’une même image. 

Avez-vous expérimenté de nouveaux procédés sur Nero qui pourraient inspirer d’autres équipes de post-production image ? 

Ce projet a une identité esthétique forte. Le travail des décors, costumes et plus généralement de la mise en scène est remarquable et marquant. L’intérêt de Romain Lacourbas porté aux essais lumières, optiques, filtres, décors, costumes, maquillage – ce qu’il fait sur tous ses projets – est crucial pour aider à préparer l’identité visuelle forte de la série. Ces essais permettent de pousser la recherche du look et de l’affiner avant le tournage. Donc mon conseil est de trouver le temps de faire ces essais correctement à chaque projet. De plus, la bonne communication entre MPC post-production, le DIT et bien sûr Magali et Romain lors de réunions avant le tournage nous a permis de prévoir sereinement les échanges entre le plateau et le labo, et ainsi d’assurer que l’étalonnage se déroule correctement. 

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